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Ekaterina Igorevna, revisite la broderie, la nourrit de son incroyable élan créateur et incarne une oeuvre protéiforme d’une grande noblesse, le brodart.
 
Fusion de la broderie, de la poésie et du code Morse dans sa série phare Brodèmes.
 
Immersion de l’artiste qui conçoit et travaille pendant des centaines d’heures pour chaque oeuvre.
 
Scansion du geste, méticuleux et vaillamment répétitif au rythme mystique et envoutant.
 
Pulsion extatique du connaisseur éclairé  avide de subtilités.
 
Oscillation du « piquer, percer, piquer, percer » avec rythme, vers et harmonie. Une poésie de la création, existentielle et mouvante comme ses pensées…
 
Disparition… comme un mystère inaccessible et intime. Chaque oeuvre d’art brodée est une pièce du puzzle d’Ekaterina Igorevna.
 
Ekaterina Igorevna oracle de la toile créatrice. Le brodart est l’art majeur de la grande réconciliation de l’artiste au travail. La broderie interprète les mystères de la vie. Ekaterina Igorevna, kaléidoscope de nos émotions.

Ekaterina : Au nom de la broderie
 
« Chaque fois, on me disait : tu fais quoi toi ? Tu as 18 ans et tu brodes ! »
Par passion, par son histoire familiale, Ekaterina Igorevna brode depuis 20 ans. Elle, qui ne se destinait pas à devenir artiste, s’emploie à réhabiliter la broderie.
 
 
Les tapis étouffent les pas dans l’atelier parisien d’Ekaterina. Le travail de l’artiste imprègne le lieu. Il apporte de la couleur à cette pièce d’esprit typiquement parisien. Prés de l’entrée du salon, un tableau brodé, représentant une joviale bacchante portant une boucle d’oreille swarowskis, est accroché. Au fond, à côté d’un mur de glace, un chevalet offre au regard une œuvre abstraite aux teintes pop. À gauche, dans un coin, une malle en osier retient à grand-peine des écheveaux de fils chamarrés.
Le silence est rompu par le tintement des tasses à café contre la grande table en marbre. Regard malicieux et pommettes hautes, Ekaterina s’assoit en souriant. Ses mains s’animent en racontant qu’elle vient de la région du Krasnodar. « C’est près de la mer noire. Chez nous, les Cosaques, la broderie est très présente. On décore les maisons avec la broderie. Quand les hommes partaient à la guerre, les mères, épouses, sœurs, brodaient quelque chose qu’elles donnaient. Ma grand-mère a brodé des tableaux, dont un portrait d’une petite fille. Ma sœur faisait du point de croix aussi.»
Suivant leurs exemples, elle a débuté le point de croix à 10 ans avec des kits. Petit à petit, elle s’est « mise à broder directement sur le canevas. » C’était un loisir prenant, « quelque chose d’intime ». Elle n’envisageait pas de devenir artiste. Elle a eu cette idée il y a deux ans, à la fin de ses études à l’université. « J’ai remarqué qu’on ne parle pas du tout de la broderie en tant qu’ art. Au fil des siècles, elle a perdu le statut d’art majeur. J’ai pensé que c’était injuste. »
Pour redorer l’image de la broderie Ekaterina a un plan : présence et réinvention.
Suivant ce dessein, elle multiplie les références aux autres formes d’art. Elle explique qu’elle « utilise des fonds dorés en rappel à l’art byzantin. » Ses œuvres, comme des peintures, sont toujours encadrées.
Elle couple les emprunts à l’art ancien avec une réflexion sur comment moderniser la broderie. Elle envisage d’explorer prochainement le côté sensuel du point de croix en jouant avec les textures, les matériaux. Elle expose que ses « prochains portraits ne seront pas aussi classiques. On m’a dit que j’étais trop sage. Je pense que je vais jouer avec les couleurs. Il faut que je le fasse, parce qu’on aime bien être étonné. »
La modernisation vient aussi par un logiciel créateur de grilles de couleurs. Cette technologie, le lui reproche-t-on ? À cette question Ekaterina réponds par un rire. « Il y a des gens qui disent que si j’utilise un logiciel, je ne fais que broder, qu’il y a un côté un peu malin. » Son ton redevient sérieux lorsqu’elle dit : « Pourtant, c’est moi qui choisis le modèle, le fond. Le logiciel ça permet de montrer que la broderie est un art qui suit les progrès scientifiques. Après, je pense que je vais limiter l’utilisation du logiciel, pour qu’il n’y ait plus du tout de questions. »
Suivant cette idée, elle interpelle les officiels, la maire de Paris Mme Hidalgo pour essayer de les sensibiliser. Comprenant que l’union fait la force, elle dialogue avec des artistes brodeurs. « Il faut se réunir. Si on fait des expos qu’avec la broderie, les gens vont se dire que c’est normal que la broderie soit représentée. » Elle améliore la visibilité de son travail avec son compte Instagram. La participation à des événements est tout autant primordiale. En février 2019, elle était au salon d’art contemporain de Versailles. Elle raconte que « c’était la deuxième édition et j’étais la première brodeuse exposée. Les gens étaient surpris de voir la broderie parmi les sculptures. » En février 2020, en collaboration avec la brodeuse Julie Sarloutte, elle va participer à une soirée organisée par Michaël Vendetta. « Il organise des soirées branchées. Je pense aussi que c’est bien de montrer la broderie lors de ce genre de soirées pour montrer que la broderie est à la mode. » Toujours lumineuse, elle conclut par : « Les gens de ce genre de soirée, ils me disent de jouer avec le mot : « Broderie ». Ils ont plutôt raison. De toutes façons, je suis très motivée ! »

Margot Fournié.

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